Vers février ou mars dernier, alors que je survolais Le Monde.fr, j’ai lu que des affrontements opposaient les forces de l’ordre à des indiens mapuches. Ces troubles sociaux survenaient à la suite de la mort de deux indiens, tués par la police. L’impression que j’en ai eu, qui se confirmera plus tard, a été celle d’un fort et durable conflit entre l’Etat et cette ethnie minoritaire et marginale. J’ai alors pensé que ce thème ferait l’objet d’un bon reportage et c’est ainsi que nous avons décidé de nous intéresser à cette communauté, par ailleurs méconnue en France.
Toutefois, la faute à une mauvaise préparation, nous ne savions rien des mapuches en arrivant au Chili le 22 juillet. C’est grâce à Massiel, une amie chilienne que nous avons revu un soir de fête à Santiago, que nous avons commencé à y voir plus clair dans l’organisation de nos recherches. En apprenant l’objet de notre étude, elle nous a mis en relation avec sa cousine Marcela, assistante sociale à Temuco (capitale de la 9ème région où vivent les mapuches). Nous sommes ainsi partis pour cette ville du sud du pays aux alentours du 27 juillet. En arrivant à la gare tôt le matin, nous avons vite découvert l’inhospitalité des lieux. Le climat y est froid et pluvieux et la ville, grise, m’a fait penser à un bled de Sibérie! Par soucis d’économie nous avons loué une chambre dans l’auberge la moins chère, mais aussi la plus miteuse du centre. Il n’y avait pas d’eau chaude et pas de chauffage et nous avons dû dormir habillés toutes les nuits.
Cependant nous avons relativisé ces conditions précaires et nous nous sommes vite concentrés sur notre objectif : les mapuches. Avec l’aide affable de Marcela et de sa copine Caro nous nous sommes rendus dans un village indigène appelé Chol-Chol, afin de récolter des informations sur la culture mapuche. Dans les même temps, Marcela nous a mis en contact avec une de ses collègues (Gabriela) travaillant dans un autre village mapuche, Nueva Imperial.
Toutefois, la faute à une mauvaise préparation, nous ne savions rien des mapuches en arrivant au Chili le 22 juillet. C’est grâce à Massiel, une amie chilienne que nous avons revu un soir de fête à Santiago, que nous avons commencé à y voir plus clair dans l’organisation de nos recherches. En apprenant l’objet de notre étude, elle nous a mis en relation avec sa cousine Marcela, assistante sociale à Temuco (capitale de la 9ème région où vivent les mapuches). Nous sommes ainsi partis pour cette ville du sud du pays aux alentours du 27 juillet. En arrivant à la gare tôt le matin, nous avons vite découvert l’inhospitalité des lieux. Le climat y est froid et pluvieux et la ville, grise, m’a fait penser à un bled de Sibérie! Par soucis d’économie nous avons loué une chambre dans l’auberge la moins chère, mais aussi la plus miteuse du centre. Il n’y avait pas d’eau chaude et pas de chauffage et nous avons dû dormir habillés toutes les nuits.
Cependant nous avons relativisé ces conditions précaires et nous nous sommes vite concentrés sur notre objectif : les mapuches. Avec l’aide affable de Marcela et de sa copine Caro nous nous sommes rendus dans un village indigène appelé Chol-Chol, afin de récolter des informations sur la culture mapuche. Dans les même temps, Marcela nous a mis en contact avec une de ses collègues (Gabriela) travaillant dans un autre village mapuche, Nueva Imperial.
Notre but principal était d’analyser la situation sociopolitique des mapuches au sein de l’Etat chilien. Grâce aux relations de cette belle assistante sociale d’origine mapuche, nous sommes parvenus à fixer trois entretiens avec des personnalités de cette communauté, dirigeantes d’organisations. Néanmoins, pour mieux comprendre la réalité sociale actuelle de ce peuple, il est primordial de rappeler son histoire en quelques lignes.
Le peuple mapuche représente la grande majorité de ceux que l’on appel au Chili “los nativos” ou “originarios”, c’est à dire les indigènes originaires de cette région (par opposition aux chiliens descendants de colons espagnols). Leur emplacement historique et naturel est situé au “centre-sud” du pays. En discutant avec plusieurs chiliens nous nous sommes rendus compte que les mapuches jouissent d’une véritable réputation de durs à cuire. Leur histoire en est effectivement la preuve: ils ont successivement résisté avec force et succès aux invasions incas et espagnoles. Caupolican, Lautaro ou Gervarino sont autant de guerriers célèbres ayant combattu les conquistadors.
Ce peuple historique se caractérise cependant par son comportement naturellement pacifique. Les mapuches (hommes de la terre en langage mapudungun) ont, comme leur nom l’indique, un rapport très étroit et indissociable à la terre. Tout au long de leur existence, ils se sont consacrés à l’agriculture et à l’élevage du bétail. Le drame des mapuches est paradoxalement survenu au moment de l’indépendance du Chili. Les nouveaux gouvernements qui se sont émancipés de la domination espagnole en 1818 ont entrepris une politique d’expansion territoriale afin d’étendre les frontières du tout récent Chili. C’est de cette façon qu’à partir de 1883, l’Etat est parvenu à exproprier les terres naturelles des indiens mapuches, ne leur laissant que 5% du total de départ pour vivre et travailler (passant à contrôler 10 millions d’hectares à environ 500.000). Cette victoire militaire de l’Etat sur les mapuches qui fût appelée Pacificación en Auracania marqua le début de la marginalisation de ce peuple et du bafouement de ses droits.
Certaines de ses terres furent même distribuées à des colons européens. Les mapuches ont alors été répartis en communautés auxquelles correspondaient de petits terrains. C’est ainsi que se sont progressivement créées des organisations partageant l’idée de récupération des territoires dans le but de préserver la culture de ces hommes de la terre. Aujourd’hui on dénombre environ 600.000 mapuches (selon un recensement de 2002). Cependant les même indigènes assurent qu’ils sont bien plus. Les différentes rencontres et observations que nous avons faîtes dans les alentours de Temuco nous ont démontré que l’ethnie mapuche est très identifiée et attachée à son peuple et à sa culture. La preuve en est qu’il existe aujourd’hui un très grand nombre d’organisations militantes à caractère social ou culturel.
Certaines de ses terres furent même distribuées à des colons européens. Les mapuches ont alors été répartis en communautés auxquelles correspondaient de petits terrains. C’est ainsi que se sont progressivement créées des organisations partageant l’idée de récupération des territoires dans le but de préserver la culture de ces hommes de la terre. Aujourd’hui on dénombre environ 600.000 mapuches (selon un recensement de 2002). Cependant les même indigènes assurent qu’ils sont bien plus. Les différentes rencontres et observations que nous avons faîtes dans les alentours de Temuco nous ont démontré que l’ethnie mapuche est très identifiée et attachée à son peuple et à sa culture. La preuve en est qu’il existe aujourd’hui un très grand nombre d’organisations militantes à caractère social ou culturel.
Les femmes que nous avons rencontrées témoignent de cet engagement. Nous nous sommes tout d’abord entretenus avec Fresia Lienqueo, dirigeante du Comité de agua potable rural el Peral. Aidée d’une centaine d’associés et de subventions publiques, cette organisation proportionne de l’eau potable à un peu plus de 500 riverains. Nous avons ensuite discuté avec Rosita, présidente d’une association indigène urbaine Debout mon frère (Mitrañe Lamien en mapudungun) dont l’objectif est de préserver la culture mapuche et d’offrir du soutien social. Enfin, Sofia Lincoqeo nous a parlé de l’organisation qu’elle dirige, dont le but est l’émancipation intégrale de la femme.
Sur le thème incontournable des terres, les 3 personnalités se rejoignent. Selon elles, ce processus a divisé la communauté en attribuant à ses membres des petites parcelles de terrains mal situées ; mais le problème viendrait surtout du fait que beaucoup de terres sont de mauvaises qualités, usées notamment par la culture de l’eucalyptus (subventionnée par l’Etat) et l’exploitation des compagnies forestières privées. Même si ce fût un sujet politique lors des dernières élections, la récupération des terres usurpées est plus un rêve qu’une réalité et les promesses des politiques ne sont jamais réellement appliquées (comme souvent et partout dans le monde). C’est comme pour effacer sa culpabilité que l’Etat a mis en place une subvention, la beca indígena, destinée à l’éducation des jeunes (cette subvention ne semble souvent pas bien perçue par les chiliens « non mapuches »). Cette “dette historique” est contrôlée par l’Etat et non par la Conadi (organisme représentatif des indigènes du pays) comme le regrette Rosita. Ce conseil sensé représenter “los originarios” et défendre les droits de cette minorité est cependant très critiqué par les mapuches eux mêmes. D’après Fresia et Sofia, la Conadi est effectivement un instrument bureaucratique plus ou moins manipulé par l’Etat. Peu à peu, ses membres se seraient accommodés à leur situation et éloignés de la base et des organisations militantes mapuches.
Ce manque de confiance et d’identification à l’égard de l’instance représentative indigène est une des explications de l’existence de petits groupes d’activistes qui utilisent la violence comme mode de contestation. Ces actions qui concernent souvent des jeunes se déroulent en grande partie dans le nord de la région (le sud est plus pacifique) et peuvent se caractériser par des incendies de bus ou des batailles de rue avec la police chilienne. Même si elle comprend leur frustration et les défend comme ses frères, Rosita insiste sur l’importance de l’action pacifique, de la communication afin de se faire entendre.
Néanmoins, il semble clair que la défense des droits et de la culture mapuche passe par une meilleure représentation politique, beaucoup de militants s’accordent sur la nécessité d’un leader qui puisse parler d’une seule voix au nom du peuple, Rosita exprime d’ailleurs son souhait d’un représentant mapuche au congrès national, qui serait élu par la communauté elle-même. D’après Rosita, les mapuches devraient intégrer les instantes politiques locales et nationales s’ils veulent faire valoir leurs droits.
C’est également ce que nous a dit Ambrosio Coñoman, candidat à un poste d’adjoint à la mairie de Chol-Chol. Nous l’avons rencontré le lendemain de nos entretiens avec les 3 dirigeantes mapuches. Ce jour là nous avons en effet été invité à boire le mate, un thé local, dans la ruka (maison typique des indiens) de ce spécialiste de la culture mapuche. Autours d’un feu aux senteurs d’eucalyptus, nous avons ainsi pu écouter attentivement ses explications éclairées.
Il existe d’ores et déjà des dirigeants politiques mapuches au niveau local tel que le maire de Temuco ou le gouverneur de la province nord de la 9ème région. Toutefois il reste beaucoup à faire, notamment quant à la représentativité des mapuches au niveau national et international. Aujourd’hui le ce peuple a l’opportunité de préserver sa culture. Il doit pour ce faire augmenter sa participation dans la société, tout en se méfiant des partis politiques qui tendent à le diviser. N’oublions pas que le peuple mapuche représente ce qu’il y a d’originaire et d’historiquement naturel au Chili et il est très important qu’il ne s’éteigne pas peu à peu comme les indiens d’Amérique du nord ou d’autres ethnies… S’ils parviennent à s’unir et à adopter une stratégie constructive, les mapuches ont toutes leurs chances de perdurer et de défendre les droits de leur peuple pour peut-être, un jour, accéder à un processus logique d’autodétermination.